Clémence est devenue une sage-femme engagée pour la valorisation du métier de sage-femme au Congo grâce à l’appui de l’UNFPA lors de diverses formations et participation à des rencontres à l’étranger. Au sein de l’Association des Sages-femmes du Congo, dont elle est cofondatrice, Clémence est investie dans la sensibilisation des agents de santé sur la fistule obstétricale, la formation en la technologie contraceptive, la réforme des programmes d’enseignement de l’école de formation des sages-femmes, la formation continue des sages-femmes..
Son rêve est de voir les jeunes sages-femmes évoluer dans leur métier et sauver des vies. Ce rêve elle le partage au sein de l’école des sages-femmes où elle est également formatrice. Pour Clémence, accoucher une femme est synonyme de construire un édifice social. Dans son être et sa pratique, chacun de ses actes représente une fibre du faisceau destinée à consolider le tissu social en couple, en famille, dans les quartiers et villages, entre les professionnels et les ayant droits des services de santé de la reproduction, entre les générations, etc. Son leitmotiv c’est : « participer à l’accroissement qualitatif et sain de la population». En revanche, elle se montre peu enthousiaste à revendiquer pour elle un mérite personnel dans l’aboutissement de son rêve d’adolescente de devenir sage-femme.
Elle raconte cependant avec tant d’admiration la détermination hors de commun pour un père africain manifesté par le sien à porter le projet d’avenir d’une fille. En effet, sa phrase presque rituelle d’adolescente : « Il faut que je devienne sage-femme !», retentie encore dans sa mémoire. Mais, plus vivaces encore demeurent dans son esprit ses souvenirs pour les initiatives engagées et résolues prises par son père à cet effet.
Clémence considère que sa formation au métier de sage-femme, au-delà des connaissances et compétences techniques qu’elle lui a apportées, a eu en plus un impact positif sur le renforcement psychologique de sa personnalité. Elle le mesure bien surtout en ce qui concerne sa capacité humaine d’acceptation de l’autre, particulièrement de l’autre en difficulté, et aussi sa capacité d’adaptation aux situations existentielles éprouvantes
Elle raconte que sa première expérience en bloc d’accouchement a été assez traumatisante. Etudiante cobaye de première année à être envoyée au bloc. Encore immature et sans expérience, elle se souvient des cris de femmes en travail, le spectacle de la sortie de l’enfant et de tout ce qui l’accompagne d’aussi répugnant que possible dans un décor sanglant l’ont complètement déboussolé! Immédiatement, elle sollicite son transfert vers une autre section.
2 années plus tard, Elle reçoit un choc psychologique plus violent que le premier. En binôme avec une étudiante de quatrième année pour une garde; celle-ci lui instruit de suivre une femme en travail et de réaliser l’accouchement. Lorsqu’elle présente un pot à la femme qui le lui demande pour se mettre à l’aise, c’est un fœtus mort et macéré qu’elle y recueille sans s’y attendre. Pire encore, tremblante de peur, il lui est fait obligation de peser le fœtus, vérifier son sexe, le mesurer et noter toutes ces informations..
Clémence a très vite appris à reconnaître autrement la valeur réelle de son métier. Elle la trouve non dans le salaire qu’elle perçoit, ni dans des gains illusoires supposés de vente de produits ou de rançonnages divers des femmes, comme c’est courant dans le pays. Mais pour elle, cette valeur se trouve précisément dans les réactions que manifestent les personnes qu’elle réussit à aider, et au-delà, dans la viabilité du réseau de relations sociales qui arrive à se construire après sur ces succès. Mais encore, elle la découvre dans les attitudes des personnes qu’elle ne parvient pas à aider malgré tout ce qu’elle aura entrepris à mettre en œuvre pour cette fin.
Récemment, Cédric, 22 ans, a conditionné le port de son premier galon de gendarmerie, par la présence à la cérémonie officielle, de Clémence, sage-femme qui l’a fait naître et a accompagné ses premiers mois d’enfant, en lieu et place de sa mère, restée dans l’assistance. Tout cela aux yeux de Clémence, représente la concrétisation de son leg à la postérité.